Douleurs, Moki témoigne
mardi 20 avril 2010

Vous souffrez de spasticité ? Vous voulez en parler ? Merci de nous faire part de votre expérience en répondant à un questionnaire témoignage (celui-ci est fermé).

Bulle "Vous nous dites... Témoignages"

Je m’appelle Moki, je suis une femme de 45 ans.

- Quel handicap avez-vous ? Niveau de la lésion ? : D5

- Origine du handicap : Traumatique.

- Depuis combien de temps avez-vous ce handicap ? : 2004

- Le type de douleur dont vous souffrez ? : Neuropathiques.

- Décrivez ces douleurs :
Elles se situent au niveau des pieds et des chevilles, comme si une bottine de feu enserrait le bas de mes jambes.
J’ai en outre une sciatique droite récurrente et une douleur inexpliquée qui me traverse brusquement la cuisse droite, sans suivre de trajet particulier, de type violente décharge électrique.
En voiture, cela peut me faire violemment sursauter... avec les risques que cela comporte.

- Sur une échelle de la douleur de 1 à 10 où vous situez-vous ? : 7 à 9, le pire étant toujours possible !!!

- Votre sommeil est-il troublé par ces douleurs ? : Oui.

- La douleur vous empêche de faire certaines choses ? :
Pas complètement, mais elles parasitent plutôt la plupart de mes activités, que ce soit d’un point de vue professionnel ou autre. Parfois, elles agissent vraiment sur ma concentration et j’ai énormément de mal à lire un dossier ou à synthétiser une affaire.
De plus, comme je peux passer plusieurs nuits sans dormir, mon travail s’en ressent.
Au bout de quelques mois, la "machine" casse et d’épuisement, aussi bien physique que moral, je suis obligée de m’arrêter. Bien sur, cela joue sur la fiabilité qui est la mienne et je comprends que mon boss se pose des questions sur le fait de savoir s’il peut compter tout le temps sur moi.
J’ai volontairement renoncé à toute demande d’avancement, car je ne me sens pas assez sûre de moi.

- Votre moral ?
Forcément, c’est difficile. Malgré les antidépresseurs, il m’arrive d’avoir des idées sombres pour enfin cesser de souffrir. Pour l’instant, j’arrive à donner le change sur mon lieu de travail. Les gens me décrivent comme enjouée et positive, même si je ne leur cache pas ressentir des douleurs. Mais ils ne peuvent sans doute pas imaginer à quel point je souffre, heureusement d’ailleurs. Je ne veux d’ailleurs pas de pitié, j’espère un peu de compréhension et j’essaye de rester d’humeur la plus égale possible.

- Ces douleurs vous isolent-elles ? :
Oui, comme je suis épuisée en raison du manque de sommeil, j’ai renoncé à toutes sorties le soir, même un petit resto m’apparaît insurmontable.
De même le midi, je reste seule au bureau pour dormir.
Plus ça va, plus je reste chez moi et ne sors que pour aller travailler.
Heureusement, mon travail est très prenant et m’amène à fréquenter un tas de personnes, et à exercer une certaine autorité. En dehors de cela, je reste chez moi. Je fais presque toutes mes courses sur internet, et même mes deux chiens ont pris l’habitude de courir seuls la campagne.
Je ne reçois pas non plus ; d’ailleurs, à bien y regarder, si je m’entends bien avec mes collègues, très bien même parfois, je n’ai pas d’amis réellement.

- Quelles en sont les conséquences sur votre entourage ? :
Je me suis beaucoup repliée sur ma famille. Célibataire sans enfant, je suis l’objet des attentions de mes parents, mais qui commencent à prendre de l’âge. En revanche, je m’entend très bien avec mes 2 sœurs ; et mes neveux n’ont aucun souci avec le handicap. Ils sont mon souffle de vie.

- Quelle écoute auprès des soignants ? :
Mon médecin traitant est un type formidable, et il cherche toujours des solutions. Idem pour mon neurologue je n’ai jamais eu le sentiment qu’ils me prenaient pour une personne aimant se plaindre. Ils m’ont toujours prise au sérieux.
Cela n’a pas toujours été le cas : comme ma situation résulte d’une tentative de suicide par défenestration, je n’ai pas échappé de la part de soignants, aide-soignantes, infirmières ou médecin au "vous l’avez bien cherché !"

- En avez vous parlé avec d’autres personnes souffrant du même type de blessure ? :
non

- Avez-vous trouvé des moyens de réduire la souffrance ? des trucs, des astuces ? :
j’aimerai bien, mais non !!!

- Avez-vous des traitements contre la douleur ? :
oui : lyrica, rivotril, et depuis peu des patches de duogésic. Cela ne fait qu’une semaine, et ça a l’air de vouloir marcher, même si il va falloir trouver un équilibre entre le soulagement et la possibilité de travailler ; pour l’instant, je suis arrêtée car j’étais épuisée par le manque de sommeil. Cela fait 4 nuits que je dors "normalement", mais je suis complètement "stone" et incapable de reprendre le boulot. Même la conduite d’un véhicule, indispensable est actuellement aléatoire. Mais si ce n’est que ça, c’est une question de dosage de quelques semaines. Je suis raisonnablement optimiste.

- Voulez-vous ajouter quelque chose qui vous tient à cœur ? :
Ce qui m’a surpris, c’est qu’une fois sortie du "cocon" du centre de rééducation, il faut de débrouiller seul. Personne ne coordonne les conséquences multiples de la paraplégie. Il a fallu que je me batte pour trouver un urologue qui veuille bien s’occuper de ma vessie neurologique et accepter de comprendre que je ne supportais plus les sondages "par le bas". J’ai subi une opération assez lourde à Nîmes, mais je ne regrette rien ; aujourd’hui je me sonde par le nombril. Cela a changé ma vie.
De même, on m’a dit de continuer la kiné, mais j’ai découvert que tous ne savaient pas prendre en charge ce genre de suites. J’ai perdu beaucoup de temps.
Enfin, pour le choix du matériel, c’est un peu la jungle.

Nous vous remercions Moki pour votre témoignage.