Epaules : en faire moins... pour rouler plus (Faire Face paratétra sept 2008)
mardi 15 septembre 2009

Rubrique du magazine : Un pro vous répond…

L’usage du fauteuil pendant plusieurs années nécessite une sollicitation quotidienne des épaules, au point que de vives douleurs entraînent parfois une diminution de l’autonomie. Thierry Albert, médecin spécialiste au Centre de rééducation fonctionnelle de Coubert (Seine-et-Marne), vous conseille.

- Faire Face : Les douleurs d’épaules sont-elles proportionnelles à l’ancienneté de la paraplégie ?

  • Thierry Albert : Il est tout à fait reconnu que l’ancienneté de la paraplégie entraîne une augmentation des douleurs musculaires et tendineuses des épaules. Elles sont dues à l’accumulation des contraintes mécaniques lors des déplacements en fauteuil, des transferts, des soulagements des appuis et de la préhension d’objets plus ou moins lourds situés au-dessus des épaules. Les pathologies induites sont les tendinites (inflammation du tendon) qui peuvent aller jusqu’à la rupture tendineuse, l’arthrose (usure du cartilage articulaire) et enfin les capsulites (perte de la souplesse de l’articulation).

- Faire Face : Comment anticiper sur ces problèmes, avant de trop fortes douleurs ?

  • Thierry Albert : Un des secrets de la prévention, c’est d’améliorer la souplesse du muscle qui, pour une efficacité optimale, doit être fort, endurant et souple. L’extensibilité musculaire représente la capacité à être étiré au cours d’un mouvement sans subir de microtraumatisme au niveau des fibres. Imaginez un élastique de bonne qualité : il ne se déchire pas quand on l’étire. C’est souvent la souplesse des groupes musculaires les plus forts qui n’est pas assez entretenue, ces muscles sont les rotateurs internes et les adducteurs de l’épaule, ceux qui se contractent quand on fait un “bras de fer” par exemple.

- Faire Face : Quels types d’exercices peuvent améliorer la souplesse du muscle et protéger ainsi l’articulation ?

  • Thierry Albert : Il faut apprendre, par le biais de son kiné, des mouvements d’étirement de ces muscles adaptés à son cas, pour trouver la position, l’intensité, la durée et la progression adéquates. Parfois, il peut être utile de faire une rééducation dite proprioceptive : on apprend alors à effectuer les gestes du quotidien qui sollicitent l’épaule sans déclencher de conflit traumatique. Dans tous les cas, un geste est à proscrire : le mouvement du bras tendu au-dessus de l’horizontale des épaules, surtout avec une charge lourde !

- Faire Face : Au quotidien, chez soi, quelles sont les adaptations à réaliser et les astuces de confort ?

  • Thierry Albert : Après avoir bien fait régler son fauteuil par un spécialiste, il s’agit d’organiser judicieusement son environnement : placer les objets lourds à hauteur de main et réduire les écarts de plan pour faciliter les transferts. Dans la journée, il faut essayer de penser à se grandir, tout en baissant les épaules pour les reposer. Autre astuce : varier sa technique de soulagement des appuis fessiers. Classiquement, ils s’effectuent par élévation du bassin en appui sur les poings ; mais ils peuvent aussi être effectués, quand l’équilibre le permet, par une inclinaison du tronc vers l’avant ou sur les côtés. Tout aussi efficace, sans solliciter l’épaule !

Retrouvez deux articles sur le site :
- Prévention des douleurs d’épaules des personnes en fauteuil roulant. Brochure conçue et réalisée par l’équipe de rééducation de l’hôpital Raymond Poincaré (Garches, Hauts-de-Seine) - Widal 0 (E. Delpech, C. Gourdon, V. Guay, P. Jaillard et B. Luneau) et par l’Institut Garches (B. Guillon, B. Luneau), illustrée par N. Muon. Co-édition Institut Garches / APF, mars 2004.
- Quand les épaules ploient, Faire Face (juin 2004)